Aujourd'hui, c'était concours blanc d'histoire.
Aujourd'hui, il y en a une qui est partie en larmes.
Vraiment.
Elle a apporté sa copie, l'a posée sur l'estrade, puis a tourné les talons en essayant d'étouffer ses sanglots.
Tout le monde l'a regardé, le prof y compris, dans un grand silence. Puis on est tous revenus à nos feuilles, sans échanger un regard. C'était vers la moitié de la deuxième heure.
Je me suis jurée de pas pleurer cette année.
Aucun sanglots convulsifs de stress, aucune larme de tristesse, aucune goutte humide au coin de l'oeil. Niet. C'est à cause du prof de géo d'ailleurs : M.Bat nous a assuré que cette année allait être dure, qu'on allait balancer nos livres par terre et qu'on allait pleurer. Et là, je sais pas vraiment pourquoi, mais je me suis jurée de ne pas pleurer. En tout cas, de ne pas verser une larme en rapport avec l'hypokhâgne.
Je m'y suis tenue. A deux exceptions près, mais qui sont mineures : de vraies larmes lorsque j'ai appris qu'une amie quittait l'hypo pour la fac, mais cela ne rentre pas vraiment dans la catégorie des larmes à propos de l'hypo; puis un début de sanglot en sortant de khôlle de philo, que j'ai bloqué d'un coup en me souvenant de ma promesse. Techniquement, les larmes n'ont pas coulées, mon sanglot n'a été qu'esquissé. Mais je me rends bien compte que j'ai failli lâcher prise, environ trois mois après ma décision.
C'est la première fois que je fais ce genre de promesse et c'est la première fois que je m'y tiens vraiment. Avant mes khôlles, je savais que j'allais rater, mais j'avais surtout peur de pleurer. D'avoir ce foutu poignard dans la gorge qui vous interdit de dire un mot, d'avoir cette stupide larme qui brille dans les cils. Je ne voulais surtout pas pleurer. Pour ma future khôlle de litté, devant mon bien aimé Dx (béni soit-il), je n'ai qu'une peur : céder devant son mépris. Je sais que je vais m'en prendre plein la tête, que je vais passer pour la plus profonde des idiotes et qu'il va me le dire, bien en face. Mais rien ne garantit que je ne vais pas céder sur le moment. Se faire descendre par son Dieu, ça doit être très douloureux...
Mais je ne veux surtout pas pleurer. Je veux tenir ma parole, comme pour montrer fièrement à M.Bat que moi non, je ne fais pas ce genre de choses, moi je suis forte et droite. Que même si je suis mauvaise en géo je garde mon calme et je ne désespère pas.
Oui c'est stupide. Jamais je n'irais le voir à la fin de l'année pour lui annoncer toute fière : "vous savez je n'ai pas pleuré".
Mais quand même.
Je ne pleurerai pas.